Journée d’études « Images des monuments antiques : formes de représentation, techniques et usages »
Journée d’études organisée par l’IRAA et l’UPPA
Lieu : Collège SSH – Salle du conseil
22 novembre 2019 à partir de 9h30
L’humanisme de la Renaissance a développé l’étude de l’Antiquité et modifié le regard porté sur ses monuments, dont les ruines imposantes constituaient le décor de nombreuses villes italiennes. Une double approche, associant l’analyse des textes à l’observation directe des vestiges, a posé les bases de l’archéologie moderne et donné naissance à de nouvelles formes d’images, conçues pour rendre compte, analyser, détailler, voire restituer les grands monuments romains. Ces images ont à leur tour alimenté l’imaginaire et irrigué la création artistique qui, à partir d’elles, s’est plu à inventer un univers formel aux multiples connotations symboliques. Les architectes de leur côté, en s’appuyant sur la pratique du relevé et des restitutions graphiques des vestiges, ont progressivement élaboré les conventions de représentation technique des bâtiments (coupes, plans, élévations).
Antiquaires, artistes et architectes ont continué de travailler de concert quand, au XVIIIe siècle, la pratique du Grand tour s’est popularisée et que les premières campagnes d’exploration ont été organisées en Campanie, en Sicile, en Grèce, en Dalmatie, au Moyen Orient. Les nombreuses images produites alors, depuis les restitutions les plus fidèles jusqu’aux visions architecturales les plus fantaisistes, se déploient sur un large éventail. Et ce sont les mêmes hommes, tour à tour explorateurs, artistes accompagnateurs, védutistes, architectes, scénographes, qui ont pratiqué les divers genres. Ainsi Giovanni Battista Piranèse ou, d’une autre façon, Charles-Louis Clérisseau.
D’autres techniques ont été utilisées (lavis, eau forte…), d’autres codes ont été mis au point et d’autres conventions se sont répandues (vues sur l’angle, effets de perspective, mise en contexte, jeux sur les échelles…). Le succès de ces images fut tel qu’il n’est pas exagéré de dire qu’il est à l’origine d’un revirement du goût en matière architecturale, trouvant son développement avec le néo-classicisme.
Au milieu du XIXe siècle, l’invention de la photographie qui « substitue à la représentation graphique des monuments d’architecture » « une image exacte » (Arago) et mécaniquement produite, a bouleversé profondément les pratiques. Alors qu’ils travaillaient dans une perspective explicitement documentaire, fondée sur une exigence de précision et de lisibilité, les premiers photographes ont inventé de nouveaux codes figuratifs, non sans cesser de se rapporter aux images antérieurement produites. Aujourd’hui, les techniques numériques mises au service de la reconstitution archéologique transforment, une fois encore, profondément la donne.
Il ne s’agit pas de refaire toute l’histoire des formes de représentation de l’architecture antique, mais d’observer, à quelques moments clés, la détermination réciproque des techniques, des modes de figuration et des formes de connaissance, afin de mettre en évidence une évolution corrélative des regards et des imaginaires, des attentes et des usages. Des premiers relevés au photoréalisme, de la réalité matérielle des vestiges aux reconstructions rêvées, cette journée d’étude tentera de dessiner les grands contours et les enjeux d’une production originale et protéiforme, constitutive d’un champ où le scientifique et l’artistique ne cessent de se rencontrer.
Contact : jean-françois.BERNARD@cnrs.fr